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G & A – une journée de leur vie – partie 1

Pour mes reportages de 24 heures, je trouve plus simple d’arriver le mardi en fin d’après-midi à l’heure de la sortie des classes et de repartir le lendemain au moment de la sieste des petits. Ainsi, plutôt que de découvrir une inconnue pour leur petit déjeuner, les enfants ont le temps de s’habituer à ma présence alors qu’ils sont bien réveillés. Du coup, je dors sur place et suis aux premières loges dès qu’ils se réveillent le matin.

Ce matin, je vous présente donc la première partie qui correspond au mardi soir dans la famille de Gaëlle & Alexandre. J’ai retrouvé Gaëlle sur le retour de l’école avec les 3 petits : Inès 3 ans et les jumeaux de 18 mois, Ellyne et Aymeric. Une joyeuse bande bien dynamique ! :-)

Cette première partie de reportage se concentre donc sur le goûter, les jeux, le repas, le bain et la mise au lit pour une bonne nuit de repos.

Le quotidien d’Aude et ses enfants

Une journée du quotidien d’Aude et de ses trois enfants pendant les vacances scolaires, entre repas, détente sur le canap, devoirs, jeux, lecture, cours de natation, ordi, télé, dessins, bisous. Bref, une journée tranquille (mais quand même bien remplie !) qui fait du bien dans une vie de famille.

Débat : enfants VS parents, qui sont nos cibles ?

Dans nos reportages du quotidien, souvent, l’on s’attarde sur les péripéties des enfants, leurs jeux, leurs émotions, mais, les familles c’est aussi, les parents, les grand-parents, les oncles, tantes, parrains, marraines, amis, etc… Comment gérons-nous, chacune, toutes ces personnes qui gravitent autour des bébés et enfants que nous photographions ?

La question du jour est la suivante :

Qui sont nos cibles principales dans nos reportages, les enfants et/ou les parents ?

 

Maryline

Les enfants ont un don naturel pour attirer notre attention. C’est donc, très naturellement, que je vais beaucoup les photographier. Mais, je n’en oublie pas pour autant les adultes qui gravitent autour d’eux. Je m’intéresse énormément à la famille au sens large, aux rapports que les enfants ont avec les adultes de leur entourage, leurs parents bien sûr, mais aussi les grand-parents, les oncles, tantes, parrains, marraines, amis de la famille…etc. Je cherche beaucoup à raconter les interactions parents/enfants, la complicité qui peut exister, l’amour forcément, le partage. J’essaie aussi, dans mes reportages du quotidien, de capter les moments sans les enfants car, oui, il se passe aussi des choses lorsqu’ils ne sont pas dans les parages.


Marine

Je crois vraiment que cette question en dit long sur qui nous sommes. Chaque photographe de famille agit instinctivement en fonction de sa propre vision de la famille et le sujet est vaste! Pour ma part, je viens d’une famille nombreuse où se mêle, indépendance et proximité très forte entre mes frères et sœurs, parents, grand parents, cousins etc. Pour moi la famille, c’est un joyeux bazar! C’est ce réseau de personnes où chacun a une place et un rôle, où les émotions circulent plus vite et plus fort que partout ailleurs.  En tant que photographe, mon instinct cherche ces connexions, ces échanges, indépendamment du rôle de chacun. C’est vrai que les enfants sont généralement plus à l’aise que les parents devant l’objectif, mais ce que j’aime particulièrement dans le reportage de famille, c’est que nous avons le temps de s’apprivoiser. Et comme mon approche est celle de la photo documentaire, j’aime aussi saisir les petits moments de vie, le « hors champs », comme cette maman qui remet son collier devant le miroir au milieu des jeux.

Sybil

Dès les premiers reportages, je me suis rendue compte que naturellement je focalisais mon attention sur les enfants au sein de la famille. Ils sont au centre du reportage et la famille gravite autour, en arrière plan, ou bien plus proche lorsqu’un des membres interagit avec eux. Je photographie à hauteur d’enfant, il est le narrateur de l’histoire que je raconte, en quelque sorte. Cela ne m’empêche pas d’obtenir de beaux moments de complicité famille-enfants, bien au contraire ! Et je me suis aperçue, au fil du temps, que cela convenait parfaitement aux parents qui sont finalement les moins à leur aise dans cet exercice : c’est parfait pour ces gens qui ont choisi ce type de prestation parce qu’ils ne se voient pas poser pour un photographe !

Annie

Mon approche de la photographie de famille est axée principalement autour des enfants. Je m’émerveille de leurs émerveillements, je me crispe quand ils piquent leur crise ; je me cale beaucoup sur leur humeur. J’ai toujours en tête qu’une photo d’un bambin immortalise ce qui est inéluctablement amené à disparaître. La manière dont il saisit un objet à cet âge ou dont il grimpe sur un canapé m’émeut.

Les adultes arrivent ensuite en second plan (j’avoue un faible pour les peaux ridées et les cheveux blancs donc si les grands-parents sont présents, je suis aussi dingo d’eux que de leurs petits-enfants). Bien sûr, je m’intéresse aux relations enfants-adultes (c’est surtout pour capter ces échanges que mes clients m’ont appelé). Mais je porte peu d’attention à la relation des parents entre eux. Peut-être est-ce parce que je passe déjà beaucoup de temps à photographier des couples lors de mes nombreux mariages …


Nadine

Pour moi, la famille est un tout qui inclut les parents. Je recherche consciemment les moments d’échanges entre les parents et les enfants parce que ce sont des instants plein d’émotions qui me renvoient à ma propre relation très fusionnelle avec mes enfants. Je tâche donc d’immortaliser tous ces câlins, ces regards tendres mais aussi les moments où le parent fait son travail de parent (devoirs, bain, repas, etc.).

Retour à la maison de famille

Chaque année, cette famille vient passer quelques semaines dans un petit village du Larzac, plus précisément dans une petite maison de village qui appartient à leur famille depuis longtemps. C’est l’occasion de déconnecter, de revoir les cousins, de faire des balades… Petit le temps, chacun a ses petites habitudes là bas mais celle qui réunit tout le monde en fin de journée, c’est le retour des brebis dans la bergerie après une longue journée dans les pâturages. Voici quelques images d’un quotidien de vacances.

Débat : la nudité dans nos reportages ?

A l’origine, notre collectif a été créé comme un espace d’échange et de partage sur nos pratiques professionnelles (de documentaire de famille, évidemment). Et nous avons souvent, entre nous, des débats ou des questions qui révèlent la diversité de regards de chacun. Il nous a semblé qu’un certain nombre de ces débats étaient pertinents, tant dans le cadre du documentaire de famille, que du reportage ou de la photo en général. Alors nous avons décidé de partager avec vous certaines de ces questions. Vous pourrez aussi nous dire ce que vous en pensez, comment vous voyez les choses en tant que maman, papa, grand-parent, professionnel etc.

La question du jour est la suivante :

Comment traiter la nudité dans nos reportages ?

Dans le reportage de famille, nous sommes souvent confrontés à la question de nos limites, faut-il photographier ou non, diffuser ou non, où s’arrête t-on ? Concernant la nudité des enfants, qui généralement n’en ont pas conscience, la question mérite d’être posée. Quelles sont les limites de chacune d’entre nous ?

 

Sybil

Je n’ai jamais ressenti de gêne de la part des parents en ce qui concerne la nudité de leurs enfants sur mes images. Ils ont vu mon travail, ils m’accueillent chez eux et me font confiance. Ils savent que ces images sont d’abord pour eux, et que, s’ils ne le souhaitent pas, elles ne seront pas diffusées. La limite à propos de la nudité, elle vient de moi et elle est celle ci : je ne montre pas de nudité frontale. Tout simplement parce que je ne la trouve pas esthétique, je ne la trouve pas nécessaire non plus. Au delà de ça, c’est pour moi une question de respect. Je m’identifie sans doute un peu trop à eux… Est-ce que je mets de la pudeur où il n’y en a pas encore ? Je ne sais pas… le fait est, naturellement, je m’arrange pour cadrer mes images de façon à la cacher autant que possible.

Annie

Comme Sybil, je n’ai jamais ressenti de gêne de la part de mes clients. Ils m’ont choisi pour mon approche documentaire de la photo de famille et donc je viens photographier leur quotidien tel qu’il se présente. Dans les familles que je viens photographier, il y a souvent des enfants en bas âge. Au-delà du contexte du bain, cela leur est naturel, à leur âge, de courir dans tout l’appart cul nu et devant tout le monde. Cette liberté, cette insouciance, c’est justement, pour moi, quelque chose qui raconte l’enfance.

En situation de reportage documentaire, je fais des photos tout le temps. Et comme la situation est normale, elle ne provoque pas de gêne chez moi au moment de la prise de vue. Ensuite, au moment du tri des images, je peux être amenée à garder des photos où la nudité est montrée de manière frontale mais seulement s’il se passe dans l’image quelque chose d’autre d’intéressant. Bien sûr, de la même manière que je change les prénoms et la localisation de mes reportages dès lors qu’il y est question d’enfants, je ne diffuse jamais ces images de corps tout nus.

Nadine

Dans le cadre d’un reportage documentaire sur le quotidien d’une famille, l’heure du bain est un moment clé de la journée que nous souhaitons tous/toutes immortaliser. C’est à ce moment que se pose la question de la nudité. En général, nous en avons déjà discuté avant avec les parents pour être sur la même longueur d’ondes : s’ils n’y voient pas d’inconvénients, je photographie ce moment tel que je le vois, sans retenue. Ils auront les images mais la publication de celles-ci ne se feront pas sans leur accord. Dans tous les cas, comme les collègues, pas de photos de face, même si les parents me donnaient leur accord. Une photo de dos, aucun souci si la photo mérite d’être vue, si elle raconte vraiment quelque chose de fort. Mais pour les photos de face, comme il est impossible sur la toile de maîtriser tous les aspects de la diffusion d’une image, je préfère m’en abstenir. Et puis les enfants sont encore trop petits pour donner leur consentement à cette exposition de leur nudité. Je ne sais pas si le fait d’être une maman impacte mon point de vue sur la question mais c’est très probable. J’ai publié sur mon site beaucoup de photos de mes enfants mais jamais de photos d’eux nus.

Maryline

Photographier le quotidien nous amène forcément à photographier des moments comme la toilette des enfants, l’habillage et le déshabillage. Ce sont de super moments, souvent très drôles, que les enfants passent avec leurs parents ou seuls lorsqu’ils sont assez grands. Sur mes reportages, les choses se font très naturellement, les parents et les enfants ont très vite tendance à oublier que je les photographie. Du coup, j’observe beaucoup les réactions des enfants à ces moments clés pour sentir s’ils sont plutôt gênés ou pas du tout. Cela se voit très rapidement et je respecte toujours leur pudeur. Lorsqu’un enfant se met à danser en culotte ou faire le clown dans le bain, c’est qu’il est très à l’aise et donc je n’hésite pas à faire des photos. Par contre, quand je vois qu’il se renferme un peu, qu’il fait vite pour s’habiller ou se déshabiller, je lui demande (s’il est grand) ou je demande à ses parents si c’est ok pour que je shoote à cet instant. Les enfants sont très honnêtes et ils savent nous faire comprendre lorsque l’on est de trop dans la salle de bain ou dans leur chambre.

J’ai pris l’habitude, lors de mes reportages, de toujours cadrer afin de cacher la nudité complète. Je pense que c’est ma propre pudeur qui joue aussi. Maintenant, lorsqu’il m’arrive de photographier un enfant tout nu, de face, je ne diffuse jamais ces photos-là non plus. Ce sont des souvenirs uniquement pour les parents et les enfants.

Marine

La question de la représentation de la nudité (qui plus est des enfants) est un sujet sensible car il confronte les deux aspects de notre métier : rendre compte du réel, capturer des images et les donner à voir, les confronter au regard du public. Ces deux étapes sont bien distinctes mais sont nécessairement liées l’une à l’autre. Même si le reportage de famille est d’abord à destination de nos clients (la famille), il est vital pour le photographe de pouvoir montrer son travail à un cercle plus large.

Il y a donc à la base, un accord avec les familles, une manière de travailler mais je crois que la décision de photographier ou non, de diffuser ou non, en dit beaucoup sur qui nous sommes, nos éducations, la société et l’époque dans laquelle nous vivons. C’est un questionnement régulier, car il montre des limites qui sont souvent purement contextuelles. Je me souviens m’être fait cette réflexion, il y a quelques temps, en regardant des vieux films de famille. Nous (Mes frères, sœur et moi) y étions nus à longueur de temps et je me suis rendue compte que je n’avais jamais laissé mes enfants courir nus sur la plage. Même famille, autre époque, autres mœurs.

De formation photojournalistique, je considère que montrer la réalité de la vie quotidienne, c’est en montrer tous les aspects, de manière spontanée et sans à priori. Pourtant, je me suis rendue compte à de nombreuses reprises, qu’un certain nombre de « filtres » viennent interférer avec cette volonté, au moment de la prise de vue, de la sélection des images ou de leur diffusion. Selon le contexte, il y a des moments que je ne vais pas prendre en photos car ils me semblent trop « crus », et il y a des photos que je ne vais pas sélectionner pour les mêmes raisons. Pour la question de la diffusion, c’est là que ma « censure personnelle » marche le plus fort :), pas de nudité complète, pas de noms, peu d’infos sur mes clients.